La panthère cachée derrière le colombe...

04/04/2024

De quoi est constituée l'image qu'on donne de soi, en société ou même dans l'intimité? Qu'est-ce qui se cache derrière ce paravent? Peut-on être fier de soi au-delà de son image?

Des personnes avec qui je travaille régulièrement m'ont tendu un miroir étonnant en me disant quelle image ils avaient de moi, à l'occasion d'une formation à l'Énéagramme. Ils me voyaient comme quelqu'un doux et gentil, et en déduisaient que je pouvais avoir besoin du renfort des autres pour m'affirmer et me faire entendre... Alors que moi, je me sens à l'intérieur comme un félin très affirmé et très déterminé. 

Cela me fait réfléchir à nouveau à l'image qu'on donne de soi malgré soi, cette image apprise il y a très longtemps, sans doute liée à des réflexes de survie de l'enfance. Nous connaissons tous ces distorsions : un leader charismatique qui cache une montagne de doutes sitôt le rideau tiré ; un nounours tendre et émotif planqué derrière un grand costaud brut-de-pomme ; moi, je me sens une panthère dissimulée derrière une colombe de la paix. Les deux images sont vraies, mais l'une est une vitrine qui sert à protéger quelque chose de très enfoui, peut-être douloureux, et l'autre est un potentiel qui a du mal à apparaître, faute d'avoir reçu la validation des autres. Ce potentiel parfois nous effraie parce qu'on ne sait pas jusqu'où il peut nous entraîner, parce qu'on a peur de faire mal aux autres si on le laisse émerger, parce qu'on a peur du jugement d'autrui, ou pour mille autres raisons... 

Nous avons en nous des dizaines de visages et d'énergies différentes

Nous avons peur de notre propre puissance. Alors nous affirmons notre visage social et parfois nous finissions par croire que c'est notre identité. Et si nous n'y croyons pas totalement, surgit le syndrome de l'imposteur : « Ils vont bien se rendre compte que je ne suis pas assez (compétent, performant, etc.) ». Je n'aime pas l'expression « montrer un masque », qui laisse penser à un mensonge délibéré. Plutôt que de masque, je parlerais d'une part de soi, mais comme on croit que c'est la seule recevable, on lui donne toute la place. S'installe une sorte de dictature intérieure qui dit « je suis comme ça et pas autrement », alors que, SI, nous sommes aussi AUTREMENT, nous avons en nous des dizaines de visages et d'énergies différentes, qui sont autant de parts authentiques de nous-mêmes. 

Il existe de nombreuses voies d'épanouissement. Pour moi-même et pour les personnes que j'accompagne, je privilégie celle-ci qui nous permet de devenir vraiment VIVANTS : reconnaître les parts multiples de soi, les accepter, les laisser apparaître de plus en plus librement. Accepter nos contradictions, explorer nos incohérences apparentes, accueillir le « monstre » à l'intérieur de nous, celui qui n'avait pas le droit de sortir du placard et qui désire ardemment être vu enfin… l'accueillir comme une simple part de nous-même, un élément nécessaire de l'équilibre global de la personnalité. Pour enfin respirer, enfin s'aimer, enfin s'affirmer comme l'être complexe et riche que nous sommes !

crédit photo: Cottombro Studio for Pexels